Le retournement de l'attention vers soi est le geste de la délivrance directe. Quand je me retourne ainsi, tout est parfait : silence intérieur absolu, sans éliminer les perceptions des cinq sens. On se sent alors comme une immense sphère de cristal, transparente et lumineuse. Ce geste est enseigné dans bien des traditions de sagesse. Par exemple, dans le shivaïsme du Cachemire, c'est le Geste de Shiva (shiva-mudrâ, shâmbhavî, bhairavîya) ou l'attention se retourne vers l'intérieur tandis que les cinq sens restent grands ouverts à l'extérieur. Ainsi, je me reconnais transparent, sans plus aucune dualité entre l'intérieur et l'extérieur. Méditer, c'est simplement cultiver cette expérience. Dans les Oupanishad, il est aussi question de ce retournement. Il y a le verset célèbre de la Katha, où il est question d'un sage qui, un jour, retourna son regard vers soi et qui, ainsi, savoura l'immortalité. Dans la Taittirîya, il y a le verset qui enseigne la présence de l'Immense (brahman) dans la "caverne du coeur", au coeur de l'intellect ou intelligence (dhî, buddhi). Ici "intellect" est à prendre au sens traditionnel : la faculté la plus subtile et raffinée en chacun, l'oeil de l'esprit, l'attention, la conscience. Or, notre essence est l'essence de tout. Ce qui gît au coeur de chacun est cela même qui se trouve au coeur du soleil. Comment le contempler ? En retournant notre attention vers l'intérieur. Voici comment Vidyâranya, un maître célèbre du XIVe siècle, résume ce geste : "Tout en faisant abstraction du monde extérieur et de (ses) cinq couches, la vision tournée vers l'intérieur voit directement l'Immense en sa nudité." (Taittirîya-vidyâ-prakâsha, 19) "Les cinq couches" sont le corps, les sensations, les pensées et l'inconscience. Au-delà se trouve le Soi, pur regard qui contemple ces choses. "La vision tournée vers l'intérieur" : littéralement, "le regard (dhî) avec le visage (mukha) vers l'intérieur (antar)". Un simple retournement du regard vers lui-même. Je suis pure vision. Je ne suis pas un corps qui regarde d'autres coprs à travers deux yeux. Je suis pure vision, sans dualité, sans intérieur ni extérieur. Je suis comme l'espace qui embrasse toutes choses. Quand je me "vois" dans les pensées, je m'identifie aux pensées, je crois que je me définit par elles. Mais quand je me retourne, je me vois "dans ma nudité" (sarvopâdhivivarjitam), je me vois immense, brut, sans forme ni couleur, parfaitement immobile et silencieux. Il n'y a aucune séparation. C'est une vision directe, sans raisonnement, sans parole, même si la parole est ensuite nécessaire pour donner du sens à cette vision non-duelle et la transposer en une certitude capable de guider la vie quotidienne. Vidyâranya ajoute encore que le regard tourné vers l'extérieur ne voit que l'Immense, mais mélangé avec ses reflets, avec les formes et les noms. Je crois alors que cette essence divine est lointaine et inaccessible - Dieu. Ce qui n'est certes pas faux, puisque jamais formes ni noms ne pourront définir l'Immense. Mais d'un autre côté, "Dieu" n'est autre que cette Lumière transcendante et inaccessible, car il est le regard même qui cherche l'Immense ! Dieu est inaccessible parce qu'il se cherche hors de lui-même. Quand ce regard en recherche, ce "mental", se retourne, il se découvre Immense, cela même qu'il cherchait. Trop proche, trop facile, trop évident... Quand je pense à Dieu, je le conçoit comme éloigné, inaccessible. Quand je me conçois, je me conçois comme incarné, mortel, limité. Mais quand je retourne mon regard, ou plutôt quand "je" me retourne, je me vois à l'état brut, dépouillé de toutes ces choses, et alors je vois que l'Immense, là-bas et le Soi, ici, sont identiques. C'est la reconnaissance libératrice. La vie intérieure est cette vie. La méditation est la familiarisation avec ce regard. Par ce regard vers l'intérieur (antar-drishtyâ dit Vidyâranya), l'état de créature limité est anéanti. Et, ajouterai-je, la personne s'accomplit ainsi. Paradoxe. Vidyâranya poursuit : "Quand la vision vers l'extérieur cesse, ce qui est vu grâce au regard tourné vers l'intérieur, c'est le trésor, c'est la conscience vivante, c'est l'Immense !" (22) A quoi bon ? Le sage répond : "Si l'on demande à quoi sert de voir le Suprême ? - on répond que cela sert à combler tous les désirs". (23) Oui, se voir soi-même, sans forme ni nom, c'est combler tous les désirs, c'est ressentir tous les plaisirs, car tout plaisir n'est qu'un fragment de cette absolue plénitude qui est notre essence. - Artículo*: noreply@blogger.com (Dubois David) - Más info en psico@mijasnatural.com / 607725547 MENADEL Psicología Clínica y Transpersonal Tradicional (Pneumatología) en Mijas y Fuengirola, MIJAS NATURAL *No suscribimos necesariamente las opiniones o artículos aquí enlazados
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